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Chère tante pardonnez moi de chagrin que vous causera cette lettre. Je sacrifie votre tranquillité au plaisir, que je ressens de vous parler et de penser à vous dans un moment de découragement et de tristesse. Depuis quelque tems je ne puis vaincre ma tristesse: sans amis, sans occupations sans intérêt pour tout, ce qui m’entoure je yois passer les meilleures années de ma vie sans fruit ni pour moi ni pour les autres et ma position supportable pour un autre, avec ma sensibilité, commence à me devenir de- plus en plus pénible. — Je paye bien cher pour les fautes de ma. jeunesse...

Ecrivez moi souvent chère tante; il n’y a rien que me donne la joie et le courage comme quelques lignes de vous qui me prouvent, que vous ne cessez de m’aimer et de penser à moi: et rien, qui me fasse tant de bien, que les excellents conseils, dictés par votre tendre affection, que vous me donnez quelquefois. —

Pour ne plus vous faire partager ma tristesse, j’aime mieux terminer ma lettre; car il m’est imposible de paraitre gai et content quand je ne le suis pas. Je tâcherais de trouver un moment plus, favorable pour vous écrire la poste suivante. Adieu, je baise vos mains, chère tante, et vous prie encore une fois de ne point me négliger comme les six mois derniers pendant lesquels j’ai reçu une seule petite lettre—vos lettres me font tant de bien.— Jene sais encore rien de positif au sujet du désir, que j’ai manifesté d’être passé à l’armée de Turquie, de même qu’au sujet de mon avancement pour l’expédition de l’hiver passé. Il parait, qu’il n’en sera rien. Les papiers qui me manquaient il y a 2 ans manquent jusqu’à présent. Il n’y aura point d’expédition cet hiver. Les démissions et les congés sont défendus jusqu’à la fin, de la guerre de Turquie. Voila pour ce qui est de mon service. Pour ce qui est de mes occupations elles sont dans un état pareil с. à d. que je ne fais absolument rien. Je suis de trop mauvaise et triste humeur pour pouvoir travailler à quelque chose. — Je décachète cette lettre juste à minuit au premier moment de la nouvelle année; je ne puis mieux la commencer qu’en pensant à vous. Je désire que le bon Dieu exauce les voeux que vous faites pour votre bonheur d’autant plus que je suis sûr que parmi ces voeux vous faites aussi celui de me revoir et de me voir heureux. —

Adieu, chère tante, il m’est impossible de vous exprimer combien je vous aime.—

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