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à une banque, à son ouvrage scientifique, artistique ou littéraire. Personne depuis 2000 ans n’a le loisir de faire ce que conseillait Jésus au commencement de sa prédication — de regarder autour de soi, de penser aux résultats de notre travail et de se demander: que suis-je? Pourquoi? Serait-il possible que cette force qui m’a produit avec ma raison et mon désir d’aimer et d’être aimé ne l’ai fait que pour que m’étant imaginé que le but de ma vie est mon bien-être personnel, que ma vie m’appartient et que j’ai le droit d’en disposer de même que de la vie des autres êtres comme il me plaira, j’arrive enfin à la conviction que ce bien-être personnel, de la famille ou de la patrie que je poursuivais ne peut être atteint et que plus je m’efforcerai à l’atteindre, plus je me trouverai en contradiction avec ma raison et mon désir d’aimer et d’être aimé et plus j’éprouverai de désenchantement et de souffrances.

Et n’est-il pas plus probable de supposer que n’étant pas venu au monde spontanément mais d’après la volonté de Celui qui m’y a envoyé, ma raison et mon désir d’aimer et d’être aimé ne m’ont été donnés que pour me guider dans l’accomplissement de cette volonté qui m’a produit?

Une fois cette μετανοία accomplie dans la pensée de l’homme, la conception de la vie payenne et égoïste remplacée par la conception chrétienne et l’amour du prochain deviendrait aussi naturel que l’est à présent la lutte et l’égoïsme.

Et une fois l’amour du prochain devenu naturel à l’homme, les nouvelles conditions de la vie chrétienne se formeraient de soi-même, tout comme dans un lêquide saturé de sel les cristaux se forment de soi-même dès qu’on cesse de le remuer. Et pour que cela se produise et que les hommes s’organisent conformément à leur conscience il ne leur faut aucun effort positif; ils n’ont au contraire qu’à s’arrêter dans les efforts qu’ils font. Si les hommes employaient seulement le centième de l’énergie qu’ils emploient à présent à toutes leurs occupations matérielles, contraires à leur conscience, à éclairer autant que possible les données de cette conscience, à les exprimer aussi clairement que possible, à les populariser et, surtout, à les pratiquer, et beaucoup plustôt et plus facilement que nous ne le pensons, s’accomplirait au milieu de nous ce changement que prédit non seulement M. Dumas, mais qu’ont prédit tous les prophètes, et les hommes acquerraient le bien que leur promettais Jésus par sa bonne nouvelle. «Recherchez le royaume des cieux et tout le reste vous sera accordi».