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* 57. T. A. Ергольской.

1852 г. Января 12. Моздок.

12 Janvier. Mosdoc.1 Station à

mi-chemin de Tiffliss.

Chère tante!

Voilà les idées qui me sont venus. Je tâcherai de vous les rendre parceque je pensais à vous. — Je me trouve bien changé au moral et cela m’est arrivé tant de fois. Au reste, je crois que c’est le sort de tous. Plus on vit plus on change. Vous qui avez de l’expérience dites moi n’est ce pas que c’est vrai? — Je pense que les défauts et les qualités — le fond du caractère — resteront toujours les mêmes, mais la manière d’envisager la vie, le bonheur doivent changer avec l’âge. — Il y a un an je croyais trouver le bonheur dans le plaisir, dans le mouvement; à present au contraire le repos au physique comme au moral est un état que je désire. Mais si je me figure l’état de repos, sans ennuie et avec les- tranquilles jouissances de l’amour et de l’amitié — c’est le comble du bonheur pour moi! — Au reste on ne ressent le charme du repos qu’après la fatigue et des jouissances de l’amour qu’après la privation.—Me voila privé, depuis quelque temps, de l’uncomme de l’autre, c’est pour cela que j’y aspire si vivement. — II faut m’en priver encore. Pour combien de temps? Dieu le sait. — Je ne saurai dire pourquoi; mais je sens qu’il le faut — La religion et l’expérience que j’ai de la vie (quelque petite qu’elle soit) m’ont appris que la vie est une épreuve. — Pour moi elle est plus qu’une épreuve, c’est encore l’expiation de mes fautes.

J’ai dans l’idée, que l’idée, si frivole, que j’ai eu d’aller faire- un voyage au Caucase — est une idée qui m’a été inspiré d’en haut. C’est la main de Dieu, qui m’a guidé — je ne cesse de L’en remercier, — je sens que je suis devenu meilleur ici (et ce n’est pas beaucoup dire, puisque j’ai été très mauvais) et je suis fermement persuadé, que tout ce qui peut m’arriver ici ne sera que pour men bien, puisque c’est Dieu lui-même qui l’a voulu ainsi. — Peut être que c’est une idée bien hardie, mais j’ai néanmoins cette conviction. C’est pour cela que je supporte les fatigues et les privations dont je vous parle (ce ne sont pas des privations physiques que je vous parle — il n’y en a pas pour un garçon de 23 ans et qui se porte bien) sans les ressentir, même avec une espèce de plaisir, en pensant au bonheur qui m’attend. — Voilà

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